par Michel Vaïs » 01 Mai 2017, 21:51
On trouve l'histoire des centres naturistes au Québec (ainsi qu'au Canada anglais et au Vermont) aux pages 168 et suivantes du livre Nu, simplement :
La situation au Québec et au Canada
Les premiers centres naturistes canadiens ont débuté dès 1939, à commencer par le Van Tan Club, près de Vancouver. L’Ontario a vu des centres fleurir autour de Toronto et dans l’Outaouais dans les années 1950 (le Sun Valley Gardens a ouvert en 1954), tandis qu’au Québec, c’est avec le Paradis terrestre, à Chertsey, que le mouvement a véritablement été lancé, en 1971, par Paul et Marcel Lépine. On reconnaît à ce centre le statut d’« école du nudisme au Québec ». Peu après, ce fut au tour du Club naturiste Laurentien, ou domaine Laurentien, à Saint-Michel-de-Wentworth au nord de Lachute, qui n’a fonctionné que deux saisons (1973-74). On raconte que Pierre Daignault, auteur de romans policiers et vedette du petit écran (il incarna le Père Ovide dans Les Belles Histoires des pays d’en haut de 1960 à 1970) distribuait des invitations pour le Club Laurentien aux clients de la taverne qu’il possédait, à l’angle des rues Sainte- Catherine et de Lorimier, à Montréal. Daignault fréquentait ce domaine avec son frère Daniel, sa sœur Louise et leurs parents. Le père, Eugène Daignault, avait incarné avant Pierre le Père Ovide à la télé. La famille avait un chalet dans la région, au lac Swell. Le Club Laurentien a fermé ses portes après l’adoption d’une politique de vêtements facultatifs (clothing optional), qui a attiré plus de voyeurs que de naturistes.
Il fut suivi, toujours en 1973, par quelques centres moins éphémères. La Vallée rustique (Normand Côté) a ouvert à Frelighsburg et Adam et Ève a occupé un terrain près de l’Estérel au Lac Masson. Il s’agit bien du Adam et Ève dirigé par Elmen Tremblay et son épouse Francine, car un deuxième Adam et Ève existait et existe toujours à Sainte-Brigitte-des-Saults. Fondé par Arthur Chartrand comme un centre authentiquement naturiste en 1972, celui-ci a carrément changé de vocation en 1977, faisant une large place aux concours de Miss nue, et s’annonce aujourd’hui ouvertement comme un centre échangiste. Toujours en 1973, L’Oasis fut fondée à La Plaine par André et Georgette Bélanger, déçus de la dimension commerciale du Paradis terrestre. Là, pour attirer l’attention des médias, on n’hésitait pas à organiser de nombreux événements n’ayant rien de naturiste : mariages, concerts rock, soirées de lutte avec des vedettes du petit écran... L’Éden à Saint-Lin (Gaston Levasseur), à ne pas confondre avec L’Éden des nudistes, qui a fonctionné brièvement dans les Cantons de l’Est, a été fondé en 1976 par des membres de L’Oasis en quête d’un terrain plus «excitant», moins familial et tranquille. L’Éden a vite offert des pièces de théâtre et des soirées érotiques.
Toujours en 1976, ont été ouverts La Pommerie à Saint-Antoine-Abbé (par Jean-Marcel Boucher, déçu du Paradis terrestre), le Cyprès à Montauban et Loisirs Air Soleil à L’Avenir, par une douzaine d’adeptes partis du Club Adam et Ève de Sainte-Brigitte. Suivit le domaine Soleil de l’amitié (DSA), à Saint-Cyrille-de-Wendover. Le Cyprès (Patrick Couture, puis Roland Dion), situé à Notre-Dame-des-Anges en Mauricie, a le plus grand terrain, au bord de la rivière Batiscan (dix kilomètres de voie navigable en canoë). Beaucoup plus petite, La Vieille Ferme se trouve dans les limites mêmes de la ville de Rimouski dont elle domine le centre et le Saint-Laurent. Citons enfin d’autres petits centres familiaux, Les Amis de la nature à Val d’Or et Cité Soleil au Lac-Saint-Jean. Certains terrains ont fermé leurs portes à la clientèle naturiste après parfois de nombreuses années : La Vallée rustique à Frelighsburg, le camping Nature Détente à Portneuf, l’Avantage tout près de Québec, le camping Tournesol en Mauricie, le centre naturiste Camping-Sauvage à Jonquière. D’autres, que je ne nommerai pas, n’ont de naturiste que le nom à cause d’une politique – parfois ouvertement – échangiste ou d’un accueil réservé aux adultes ou aux gais, par exemple. L’exclusion des enfants s’oppose en effet à une pratique naturiste pleine et entière.
À relire la liste des premiers centres naturistes québécois, il est piquant de constater que ceux dont les noms font directement référence à la Bible (Le Paradis terrestre, Adam et Ève, L’Éden) ont été les plus portés sur l’échangisme, les soirées érotiques et les concours de Miss nues. En d’autres mots, on se réfère à un temps d’avant le péché originel comme pour affirmer que l’on est au-delà des tabous... dont on a pourtant la tête toujours bien pleine. En revanche, ceux dont le nom fait référence à des aspects de la nature ont été – ou sont encore – les plus respectueux de l’environnement : La Pommerie, La Vieille Ferme, Loisirs Air Soleil, Domaine Soleil de l’amitié, L’Oasis, Le Cyprès...
====
Par la suite, je traite de l'ancêtre des groupes naturistes québécois, les Quetans de Gaëtan Couture, qui a fait deux ans de prison sous Duplessis pour avoir fondé en 1949 son domaine naturiste dans le village de Mille-Isles des Laurentides, entre Lachute et Saint-Jérôme.
facebook.com/nu.simplement